KHI - 2, 3 juin 2015

Comme une planche de salut, un signe parmi d'autres, mais reconnaissable ;
Comme une tranche de pain ;
Comme une main tendue au-dessus du mur dans l'entrelacs ferraillé des lisières infranchissables ;
Comme une lumière au fond de l'arrière-cour, sans respiration ou si lente pour pouvoir résister ;
Comme un dévers d'où l'on se jette dans le vide ou comment perdre la mémoire ;
Comme un éloge du matin, dans le ciel étagé des commencements ;
Comme un panier de fruits ;
Comme une question sans réponse ;
Comme un passage dans les ombres des hauts murs ;
Comme un mot en trop, ou rien que des mots de travers, ou pas de mot du tout ;
Comme une grenade à bout portant de la main qui arrache la poussière de sa gangue bleue et ferme les yeux des enfants ;
Comme un regard blessé puis mort, puis le silence. Il y a ceux qui ne compte pas, on dit les laissés-pour-compte ;
Comme un héritage maudit ;
Comme des milliers de bateaux à l'accostage d'eux-mêmes, on ne sait pas si la mer les porte ou s'ils tiennent seuls dans les cordes déroulées du matin, où les cris des pécheurs ne disent plus l'espérance du départ, comment ne pas rester à terre ;
Comme une défaite annoncée ou le désert retournera au désert ;
Comme la baie des anges, j'arrive où je suis étranger (Aragon) ;
Comme des anges sans aile qui se noient dans le ciel ;
Comme une ombre humaine dans le fond des yeux, ce qu'il regardait n'existait plus, il penchait la tête sur le côté, en marchant, ce qu'il disait n'effrayait plus personne ;
Comme un léger recul dans le passé ;
Comme un rappel. Ce que je sais de toi ne vient pas jusqu'ici, j'ai tant tardé à apprendre, j'ai tant tardé à t'oublier ;
Comme en arrière de ce que nous décidons, on ne transpose pas d'un monde à un autre ce qui serait un désir, un feu demeurant et les départs ne sont jamais identiques, comme les retours, inattendus ;
Comme les retours ;
Comme un alentour où nous ignorons ce qui nous sautera à la gorge, dans le piège d'un ciel qui n'admet plus les allitérations, les légers décalages d'un bleu sur l'autre, ou du bleu sur le blanc, ou du bleu sur le gris. Le vrai miroir est dans les vagues de See View à Clifton. On efface à mesure qu'on s'alarme ;
Comme un défaut dans la cuirasse, cela vaut pour les soldats comme pour les mercenaires, les veuves et les apprentis ;
Comme des vérités qu'on n'entend pas, ou qui ne sont pas bonnes à dire, vingt-et-une personnes assassinées dans un matin habituel, femmes et enfants rangés aux faits divers ;
Comme une litanie, on compte, on décompte sur la carte météo des morts ;
Comme un impossible, celle ville à l'arrachée de la vie.