Jamais il ne lui dira au revoir puisqu’elle est morte. Jamais il ne la reverra, jamais il ne sera pardonné. Sur la route de Querré (D391), les hautes fougères qui bordent les talus prennent des teintes automnales. A la fin, les lignes devant lui se croisent, dessinent des élévations dépouillées, d’un bleu-vert intense, répercutent leur origine sur le ciel, tout finit par une moisson de papillons, un foisonnement d’éphémères et les rêves deviennent inaudibles. De brusques éclaircies illuminent le sommet des arbres, les effilent pour les perdre plus haut à la limite du ciel visible. Il repense à cette abstraction des paysages, des distances qu’il faut franchir pour en apprécier les courbes qui esquissent des visages et des mondes presque humains. Une abstraction inachevée où il se retranche. Il a rêvé de vagues qui viennent battre les talus, il a rêvé de souffles souterrains qui donnent son rythme aux étendues d’orge et de blé qu’il longeait, il a rêvé de gestes qui étaient simplement rassurants, instinctifs, dépourvus d’arrières-pensées. Et les rêves deviennent inaudibles et désorganisent les visions, disloquent ce qui reste de certitude, ce reste accroché aux limbes des jours anciens, ces cendres qu’on finit par jeter mais qui toupillent encore au bord des accidents.
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