Second roman paru à titre posthume (le premier : Les Étudiants, janvier 1919), Les Grenouilles dans la Mare (1920) est complètement achevé dès juillet 1914.
Ce volume devait être le premier d'une série de quatre que Moselly se proposait de publier pour décrire l'état d'esprit de la société française au moment de la déclaration de guerre.
Le second volume aurait évoqué Charles Péguy et différents milieux intellectuels d'avant-guerre (le faubourg St-Antoine et ses ouvriers aristocratiques, étude sur le tango, la vie parisienne, etc.). Le troisième aurait été le journal d'un savant (botaniste ou entomologiste). Quant au quatrième, à en juger par les cahiers de Moselly, il aurait fait revivre, en une suite d'impressions et de tableaux recueillis sur le vif, Paris dans les premiers mois de la guerre.
Avec Les Grenouilles dans la Mare, Moselly s'intéresse aux mœurs électorales d'une province du centre (L'Orléanais) qu'il a habitée pendant plusieurs années. Tout en faisant le procès des politiciens d'arrondissement, dont il met en scène un spécimen des plus accomplis en la personne du député Grapillard, il raconte la peine des humbles, de ces prolétaires qui gagnent péniblement leur vie à la sueur de leur front et pour lesquels, cependant, il entrevoit des jours meilleurs.
Au député républicain Grapillard, véritable tyranneau de province, qui ne recule devant aucune bassesse pour assurer sa réélection, il oppose un nobliau, le comte Rocheton des Emblavures, défenseur de la réaction conservatrice et le chemineau Joseph Chambournac, interprète des revendications populaires.
Dans un style alerte et vivifiant, il dépeint avec ironie les mœurs politiques de la Troisième République, les assauts de démagogie et les perversions de la démocratie parlementaire, bref tous les ingrédients de « la farce de la Marmite électorale ».
C'est sans doute dans ce roman que Moselly exprime le plus nettement ses affinités à la cause socialiste. Avec Joseph Chambournac, il s’indigne de la misère de la condition ouvrière et voit dans « le peuple [la] seule force intacte dans la décomposition des partis ».
Par contraste avec les remugles de la vie politique, Moselly nous offre le spectacle charmant de l’idylle entre le journaliste-écrivain Jacques Pradines et l'exquise cantatrice Charlotte Maës. La beauté de l’art et de l’amour paraissent alors la planche de salut pour s’élever au-dessus des miasmes de la mare grenouillante et donner quelques notes d’espoir dans la nature humaine.
Ce roman est fait de choses vues et scrupuleusement notées par Moselly, dans lequel, selon Charles Daudier, il a « déployé et affirmé toutes les qualités, toutes les ressources de son talent souple, subtil et précis ».