Un chemin martelé, la vie, un chemin difficile à passer, la vie, quand le soleil écartelé tombe, roule, sombre, aux devantures de la vie, la vie, installée comme un enfant quand il pleure, silencieux, prostré, délivré, sur ce chemin qui descend, qui monte, entre des rêves, où la vie n'est plus la vie, entre les larmes, et cette porte encore ouverte, un instant de vie, la vie, mais la vie quand les amants sont trahis, qu'en reste-t-il ? Quand les amants décident de s'ignorer, illusion, illusion de vie, ils ont frappé à cette porte et attendu, ils s'éloignent l'un de l'autre, un instant suffit, un instant de vie trahie, et d'autres viennent et subissent le même sort, le même hasard de vie, la même fraction d'indifférence, ils rêvent, ils oublient, leur histoire n'est pas possible, il n'y a pas d'histoire dans cette vie, la vie d'où ils s'absentent, ils frissonnent, ils ont peur, seuls séparés sur des chemins séparés, ils ne gardent même pas la mémoire de leurs voyages, tous les voyages qui les mènent nulle part, dans le vide de leur amour, dans le vide de leur vie, la vie, quand les villes s'endorment, les villes fermées sur leur silence, elles ne les accueillent plus, ces villes et ces amants désunis par la vie, leur vie meurtrie, jetée dans un ciel qu'ils croyaient clair, devenu noir, la vie noire où ils cachent leur désir, leur désir de vie, la vie qui se nourrit de leurs mensonges, jetée dans un délire d'ombre, tous les non-dits qui les affament, c'est une course contre eux-mêmes, ils y perdent leur souffle, ils perdent la raison, cette conspiration contre la vie, dans le corps, cette douleur lente, froide, étrange, comme un corps lacéré, ils mendient la vie, cet amour qui les paralyse, où se forgent les passe-droits de leur mémoire, cet amour franc-tireur, jusqu'à l'égoïsme, jusqu'à la négligence de la vie, la vie interdite, coupable, constellation perdue, quand il n'y a que des ressacs froids pour abri, une seule vie, le rêve énucléé, naïf, naïf jusqu'aux larmes, cet amour obsédant comme une blessure nauséeuse, cet amour contre la vie, la vie des amants séparés, quels jeu prétendaient-ils jouer ? Quels gibiers traquent-ils ? Qui les pousse ? Qui finira par les traquer ? Quel gibier deviendront-ils ? Qui les déshéritera ? Qui pérore contre eux ? Mais la vie ne questionne pas, et cet amour révulsé où ils trébuchent l'un et l'autre, tous, toutes, tour à tour, cet amour est une forfaiture, amants, votre témoin s'est parjuré, il n'a fermé aucune porte et vous avez attendu quelque part, vous imaginiez une morale à cette histoire, il n'y pas d'histoire, il n'y a pas de morale, c'est la vie, la vie friable de vos envies, cette paresse mise à vous défendre, ces caresses sans amour, cet amour comme un cadeau mort, la violence mise à vous aimer, cette ferveur à dire votre amour, à crier les raisons de vos passions, la violence pour ce seul amour, cette violence de la vie vous trompe et vous étouffe, cette violence mise à vous trahir et à vous séparer, cette semence de la vie dans votre amour éventré, cette folie où vous hurlez, longtemps, très longtemps, machinalement, et la vie, la vie morcelée comme un refus, refus d'aller, refus d'entendre, d'accompagner la vie, la vie hallucinée de vos désirs mort-nés, les amants contre les amants, habitués à frauder la vie, les amants égorgent les amants, ils tombent, mésalliance que leur pari d'amour, mésalliance, cette fugue dans les francs-bords de leurs désirs, les amants implorent la vie, la vie ligaturée, quelle humiliation ! Ils implorent encore, maladroits, cet amour frelaté d'un amour qui aurait pu être, qui n'est pas, juste une gerçure, un lapsus de la vie, une fraude à la vie, les miroirs idolâtres seront détruits, et la vie restera une gueuse, cette banalité, intime banalité.